Des démarches variées en ville
Pourquoi la science participative se plaît-elle en ville?
La science participative fonctionne plutôt bien en ville et l’on voit même apparaître de plus en plus d’initiatives exclusivement consacrées à la biodiversité urbaine. Cela peut s’expliquer de différentes manières :
1- Les scientifiques ont besoin de données sur la ville
Avec l'essor de l'écologie urbaine, l'écosystème urbain a beau être de mieux en mieux connu, un véritable manque d’informations subsiste concernant les espèces présentes à l’échelle de la rue ou de l’espace vert collectif. Pourtant, ces données sont indispensables pour comprendre comment certains facteurs influent sur la qualité de la biodiversité urbaine, et par extension sur la qualité de vie des citadins, les deux étant liés.
2- Une occasion pour le citadin de se reconnecter à la nature
Les citadins sont plutôt friands de ce type de démarches qui leur permettent d'appréhender une nature dont ils sont de plus en plus éloignés. Elles représentent même parfois la seule relation avec la nature qu'ils peuvent avoir. Et elles sont tout à fait accessibles car elles concernent souvent la biodiversité ordinaire, c'est-à-dire les espèces communes que l’on peut rencontrer facilement.
3- Un fort potentiel de participation
Avec 50% de l’humanité qui vit en ville et 80% de la population des pays développés, les villes abritent forcément de nombreux participants potentiels pour ces initiatives.
4- Une dimension sociale
En ville, les initiatives concernent parfois les usagers d’espaces collectifs, ce qui favorise la participation en groupe ou au moins les échanges entre résidents. Cela créé du lien social et stimule l’implication de chacun.
5- Un contexte propice à créer l'effervescence
En ville, une personne observant les plantes au pied d’un arbre dans la rue ou les oiseaux dans un parc passe difficilement inaperçue ; elle intrigue, suscite un intérêt particulier qui peut avoir des retombées positives sur la démarche à laquelle elle participe.
Des démarches propres à la ville
Parmi les nombreuses démarches menées dans les pays francophones, en voici quelques-unes qui concernent exclusivement la biodiversité urbaine :
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Sauvages de ma rue
C’est une initiative française qui concerne la flore urbaine et qui, après avoir démarrée en Ile-de-France en 2011 s’est étendue à toutes les villes de France, avec des adaptations régionales (voir « Sauvages de PACA »). Il s’agit de la seule démarche spécifiquement urbaine faisant partie du programme de science participative Vigie-Nature. Elle est co-fondée par le Muséum national d’Histoire naturelle et l'association Tela Botanica.
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Ma ville Mes chauves souris
Ce projet a été lancé en 2013 à Grenoble, et il a pour objectif le suivi et la protection des chauves-souris de l’agglomération grenobloise.
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Urbanbees
Le volet « Science participative » du projet Life + Biodiversité « Urbanbees », lancé en 2010 sur le territoire du Grand Lyon, est basé sur l’observation, la capture et l’identification des abeilles sauvages en ville, notamment afin d’étudier les relations fleurs-abeilles.
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Monarque sans frontière
C’est un programme canadien, autour de la conservation d’une espèce de papillon en déclin, le Monarque, mené avec les habitants de la ville de Montréal.
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Hulotte parisienne
Le but de ce projet est d'établir un état des lieux rétrospectif et actuel concernant la population parisienne de Chouette hulotte, afin de confirmer ou non la rareté voire la raréfaction de cet oiseau à Paris, pour le cas échéant contribuer à en inverser la tendance.
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Biodiversité dans mon jardin
C’est un observatoire de la biodiversité des jardins collectifs urbains qui est porté par l’association Naturama dans la communauté urbaine de Lyon.
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Observatoire Départemental de la Biodiversité Urbaine (ODBU) de Seine-Saint-Denis
L’Observatoire départemental de la biodiversité urbaine de la Seine-Saint-Denis (ODBU) est né en 2005. Avec l’aide des scientifiques et des associations naturalistes, il a pour but de mutualiser et de partager la connaissance sur la biodiversité en ville, auprès des gestionnaires d’espaces verts, des aménageurs, mais également des habitants. Son objectif est de développer des pratiques citoyennes autour de la valorisation et de la préservation de la nature.
Voir Fiches expériences associées :
24 heures pour la biodiversité
Observ'acteur de la biodiversité urbaine
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Observatoire culturel et participatif de la biodiversité urbaine de Dijon
Cet observatoire a été créé en 2012. Il est porté par le Jardin des sciences, avec la ville de Dijon et le Muséum d'histoire naturelle. Une des originalités de cette démarche est de restituer à tous les publics les résultats collectés par le réseau des observateurs volontaires, de manière attractive, notamment au travers d'événements culturels d'horizons multiples.
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Inventaire participatif de la biodiversité de Neuchatel
En 2010 le Muséum d’histoire Naturelle de Neuchâtel a lancé ponctuellement un vaste recensement de la biodiversité dans sa ville, avec la participation de la population. Cet inventaire a permis de recenser plus de 15 000 espèces.
D'autres démarches trés pratiquées en ville
D’autres démarches, bien que n’étant pas exclusivement consacrées à la biodiversité urbaine, sont très pratiquées en ville, dans les jardins privés ou les parcs publics :
- C’est le cas de LA PLUPART DES OBSERVATOIRES DU PROGRAMME VIGIE-NATURE fondé par le Muséum national d’Histoire naturelle en partenariat avec des associations :
- dont les observatoires citoyens (auquels tout un chacun peut participer, sans conaissance préalable sur la biodiversité) :
- Suivi photographique des insectes pollinisateurs (Spipoll),
- Observatoire des Oiseaux Des Jardins (ODJ),
- Observatoire de la Biodiversité des Jardins (OBJ),
- et les observatoires destinés aux gestionnaires d’espaces verts :
- PROPAGE, sur les papillons,
- FLORILEGE, sur la flore urbaine.
Précisons que ces observatoires nationaux peuvent servir d’appui à certains observatoires locaux comme par exemple l’Observatoire Départemental de la Biodiversité Urbaine de Seine-Saint-Denis ou l’Observatoire participatif et culturel de la biodiversité urbaine de Dijon.
- En Belgique, c’est également le cas du projet « DEVINE QUI? » de l’association Natagora, qui connait un certain succès en ville.
- Au Canada, LE RESEAU QUEBECOIS D'INVENTAIRE ACOUSTIQUE DES CHAUVE-SOURIS est également très pratiqué dans les zones urbaines.
- L’OBSERVATOIRE DES SAISONS, un programme scientifique et pédagogique français qui invite les citoyens à mesurer l'impact du changement climatique sur la faune et la flore, est un autre exemple d’observatoire apprécié des citadins.
Des lieux originaux
Le milieu urbain est singulier et voit donc fleurir de nombreuses initiatives dans des lieux à priori surprenants, mais particulièrement intéressants sur les plans scientifique et éducatif.
En pleine rue
L'observatoire « Sauvages de ma rue » s'intéresse aux dynamiques de la biodiversité à l'échelle de la rue. Il permet aisni aux chercheurs de mieux appréhender la connaissance de la répartition de la flore en ville et l’impact des « brèches urbaines » (pieds d’arbres, espaces engazonnés, interstices du béton…) sur la qualité de la biodiversité. Cela permet également aux citadins d'apprendre à reconnaître les espèces végétales qui poussent près de chez eux, dans leur environnement immédiat.
Dans les jardins collectifs
C’est le cas de la démarche lyonnaise « Biodiversité dans mon jardin ». Les jardins collectifs constituent aujourd’hui d’incontournables espaces de nature en ville et à ce titre ils sont des supports tout désignés pour ce type de démarche. De plus le public des jardiniers de jardins collectifs a souvent une vision productiviste de ces espaces, il semble donc intéressant de les sensibiliser à la prise en compte de la biodiversité pour les rendre plus acteurs de leur patrimoine naturel. Chaque année, un thème est abordé (oiseaux, petits mammifères…) et il fait l’objet d’une enquête et d’un recensement par les jardiniers. Ce projet a fait des petits et de nombreux jardins collectifs ou partagés sont aujourd’hui rattachés à cette dynamique.
Dans les espaces verts d'immeubles
Dans le cadre d’un projet pilote mené par l’association GDIE avec le bailleur social Paris Habitat OPH en 2013-2014, deux observatoires du programme Vigie-Nature ont été testés dans les espaces verts de résidences collectives. Il s’agit du Spipoll et de l’ODJ (voir plus haut), dont les protocoles sont adaptés aux espaces collectifs (plusieurs observateurs pour un même site). En plus de renforcer le respect des espaces verts, les animations pédagogiques mises en place pour tous les résidents ont joué un rôle social. Grâce à une pérennisation de la démarche, les données issues de ce projet pourraient à terme être utilisées par le bailleur pour orienter les mesures de gestion de ses espaces verts.
Suivre les espèces avec mon smartphone ou ma tablette, c’est possible !
Une tendance est l’apparition de démarches faisant appel à l’usage des smartphones et des tablettes numériques. Ces outils sont de plus en plus utilisés par le grand public et ils offrent de nouvelles pistes aux sciences participatives. Il semblerait que cette tendance favorise l’implication des participants et soit particulièrement apprécié des citadins.
C’est le cas par exemple pour le projet grenoblois « Ma ville, mes chauves souris ». Les citadins perçoivent des informations avec leur tablette numérique lorsqu’ils passent à proximité d’un capteur ultrasonore. Les capteurs installés dans le cadre du projet permettent de capter les ondes émises par les chauves-souris et c’est le logiciel de traitement « Soundchaser » qui transforme les ondes en un signal indiquant de quelle espèce il s’agit.
D’autres démarches originales et spécifiquement urbaines s’appuient sur les smartphones dans le monde entier:
Citons par exemple l’application mobile pour smartphones « Cockatoo Wingtags » qui permet de son côté l’implication des habitants de Sydney, en Australie, dans le suivi et l’étude des Cacatoes de leur ville.
Ou encore les projets basés sur l’utilisation du logiciel de cartographie numérique « Opentreemap », qui permet une implication des citoyens et des gestionnaires de la ville dans la cartographie et le suivi des arbres depuis leur smatphone. Son utilisation se développe dans de nombreuses villes des Etats-Unis comme par exemple à Philadelphie avec le projet « Phillytreemap » ou à San Francisco avec « Urbanforestmap ». Ce logiciel permet notamment de garder sous contrôle l’état de santé des arbres, mais aussi d’avoir un calcul immédiat des bénéfices apportés par les plantes à la communauté en termes de dépollution et de rafraîchissement de l’air.